mardi 7 février 2017

La Creuse entre deux mondes

La Creuse entre deux mondes

À la Belle Époque, la Creuse vit entre deux mondes, au coeur de la France. Dans les villages, les temps médiévaux ne semblent pas si lointains au regard des pratiques usuelles et des traditions. Les paysans, individualistes par nature, vivent en autarcie dans des horizons limités, sous l'autorité patriarcale. Mais, chaque printemps, l'émigration les conduit de plus en plus nombreux jusqu'à Paris ou Lyon. Il leur faut nourrir les familles, ce qu'une terre ingrate, conjuguée à la modicité de la superficie des fermes, ne permet pas. En août 1914, la guerre les arrache soudainement aux leurs, privant le département de ses forces vives. C'est un député de la Creuse, René Viviani, élu à Bourganeuf et devenu chef du gouvernement, qui signe l'ordre de mobilisation générale. L'esprit de revanche tenaille ceux qui veulent croire en un conflit bref et victorieux. Ils ignorent alors qu'environ 11 000 Creusois trouveront la mort du côté de Verdun et sur les autres champs de bataille. Le département ne s'est jamais remis de cette tragédie.

En attendant, dans les années d'avant-guerre, paysans, artisans, commerçants et ouvriers vivent modestement, économisant sou après sou. Les petites villes et les bourgades sont grouillantes de vie et d'activités. Les fonctionnaires sont de plus en plus nombreux à l'école, à la poste, à la perception... Les instituteurs, du fait de la volonté de la IIP République, sont de mieux en mieux formés à l'école normale de Guéret. Respectés par la population, ils s'affirment, aux côtés du maire et du curé, comme des personnages incontournables des communes. Aussi de nombreux Creusois préfèrent-ils devenir fonctionnaires plutôt que de devoir manier la charrue ou la truelle. Le département a enregistré, en 1851, avec 287 075 habitants, son apogée démographique. Mais depuis, la tendance est à la baisse ; une évolution dramatiquement accélérée par la guerre (278 423 habitants en 1876 et seulement 228 244 en 1921).

Des familles de grands bourgeois exercent, dans l'entre-deux-siècles, leur forte influence tant politique qu'économique sur cette terre profondément républicaine. La Creuse vénère son ancien député Martin Nadaud, ce fils de paysans de La Martinèche, devenu maçon, contraint à l'exil en Angleterre en raison de son engagement politique. Il doit, encore aujourd'hui, sa célébrité à cette phrase devenue proverbiale : "A Paris, lorsque le bâtiment va, tout va, l'activité de chacun se décuple." La Creuse se reconnaît en cet homme.

Le département, à la Belle Époque, s'avère un creuset intellectuel et artistique, avec la tapisserie d'Aubusson ou de Felletin, et avec les peintres de Crozant qui emboîtent le pas à Claude Monet et Armand Guillaumin. Les bâtisseurs, partis gagner leur vie dans les villes, reviennent avec des idées nouvelles. Ils rapportent aussi suffisamment d'argent pour agrandir la propriété familiale ou pour permettre au confort d'entrer dans la maison. Certains, devenus entrepreneurs, se font édifier des demeures plus ou moins cossues pour abriter leurs familles. C'est ainsi que la Creuse s'ouvre aux temps modernes et s'agrémente de châteaux, témoins de la prospérité et de la réussite. L'électricité arrive dans les maisons tout comme l'eau au robinet, transformant peu à peu la vie quotidienne. Le chemin de fer irrigue, de manière éphémère, le territoire. Le sous-sol livre charbon, or et autres minerais.

Les photographes de la Belle Époque captent un monde en quête d'avenir même s'ils se complaisent souvent dans le passéisme et la nostalgie. Pourtant, leurs clichés demeurent les meilleurs témoins d'un univers disparu, aujourd'hui si lointain. Des prises de vue parlent comme des livres. Il suffit de prendre le temps de les scruter, sans négliger les détails souvent évocateurs. Ici comme ailleurs, la Creuse de la Belle Époque, lorsqu'elle ôte ses habits de fête, apparaît pour le plus grand nombre de ses habitants à la fois dure et laborieuse, besogneuse et multiple. Les villageois possèdent néanmoins le goût des fêtes et des kermesses, qui sont, avec les foires et les veillées, autant d'éclaircies dans leur quotidien. Le petit peuple creusois, fidèle à ses racines, courageux et déterminé, fournit à la France des maçons mais également une belle moisson de personnalités qui contribuent à bâtir le XX' siècle naissant.

Présentation de l'éditeur

Regroupant près de 200 cartes postales anciennes, Bayonne d'antan offre
 aux Bayonnais de redécouvrir leur cité il y a plus d'un siècle. L'ouvrage
 s'articule autour de cinq grandes parties géographiques : En arrivant par
 l'Adour ; Le Grand Bayonne ; Les ponts sur la Nive ; Le Petit Bayonne ;
 Le quartier Saint-Esprit. Une dernière partie est consacrée au quotidien et
 à l'art de vivre en 1900.
 L'iconographie provient de plusieurs fonds de cartes postales anciennes,
 permettant ainsi de réunir une collection exhaustive sur la ville de
 Bayonne.

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