C' est un scandale. Du vrai racket. Depuis j'ai bien du mal à réaliser ce qui m'est arrivé. Je n'arrête pas de pleurer, c'est l'horreur." Hélène Dupoisson, professeur de collège originaire de Valenciennes, est encore sous le choc. Et les mots s'entrechoquent dès qu'elle raconte l'histoire dont elle dit avoir été victime jeudi dernier à hauteur de la frontière franco-espagnole de Puigcerdà. "Braquée, affirme-t-elle, avec un revolver et par des policiers catalans".
Divorcée et en vacances dans le secteur de Bourg-Madame, elle avait décidé de profiter de la journée, jeudi dernier, pour aller faire quelques courses en Andorre en compagnie de sa fille de 10 ans et de son fils de 14 ans. Vers 21 heures, elle rentrait donc en France quand, à hauteur du Puigcerdà, des policiers lui ont fait signe de se garer sur le côté. Jusque-là...
"Naïvement, je leur ai fait un grand sourire. Le moteur tournait encore. Ils étaient trois, ils m'ont demandé mes papiers que je leur ai donnés. Un policier a fait le tour du véhicule puis il m'a parlé, et parlé encore. Mais en catalan. Je ne comprenais rien à ce qu'il me disait. Seulement qu'il me demandait 60 euros cash. Il répétait "le véhicule imobilitat" . J'ai dit pourquoi ? J'ai toujours respecté les limitations de vitesse et le code de la route. Je lui ai demandé s'il parlait français, d'appeler un collègue qui puisse me comprendre. Il a refusé. Alors je lui ai fait comprendre que je voulais aller jusqu'à la frontière avec eux pour trouver quelqu'un qui puisse m'expliquer. Ils ont refusé. Ils m'ont montré les menottes. Je leur ai dit que j'étais toute seule avec mes deux enfants, que mon portable ne passait pas en Espagne et que j'étais à 1 000 kilomètres de chez moi. Mais, ils ont sorti le sabot et ils ont essayé de le mettre à l'arrière de la voiture."
Tout se passe ensuite très vite. "Je ne savais pas comment faire. J'étais perdue. Et complètement paniquée. J'ai repris la route pour atteindre la France à quelques mètres. Je leur ai dit je reviens. Je leur ai même laissé mon permis de conduire. Sachant que c'est ma seule pièce d'identité car ma carte est en renouvellement chez moi et que je n'ai pas pu l'avoir avant de partir. Je n'ai pas roulé vite. Mais le temps qu'ils réagissent, j'étais arrivé au rond point avant la frontière. Sirène hurlante, ils ont essayé de me rattraper. Je me suis engagée sur le pont de Bourg-Madame et dès que j'ai été en France, je me suis arrêtée et j'ai coupé le moteur. Sûre que j'étais de régler l'affaire."
Or, l'histoire ne va pas tourner comme prévu. "La vitre de mon véhicule était baissée. Les policiers se sont garés à côté de moi. L'un d'eux, celui qui m'avait arrêtée a essayé de prendre la clef, m'agressant au visage avec son bras. Je me suis défendue. Il a essayé de m'enlever la ceinture de sécurité. Je me suis encore défendue. Et là, avec un regard révulsé, il a dégainé son revolver et il m'a visée en enlevant le cran de sécurité. Je l'ai regardé droit dans les yeux et, là, j'ai eu peur qu'il tire. Ma fille hurlait, terrorisée. Je l'ai plaquée contre le fauteuil. Et je n'ai plus dit un mot. Mon fils est sorti du véhicule, il leur a dit "revolver, interdit de faire ça" . Le policier s'est retrouvé tout penaud. Deux autres Mossos d'esquadra sont arrivés qui savaient parler français. Enfin, j'allais pouvoir m'expliquer. Mais ils sont revenus à la charge pour que je retourne côté espagnol. J'ai refusé. Pour ne pas me retrouver menottes aux poignets, j'ai donc accepté de payer les 60 euros en liquide. Et ils m'ont donné des documents à moitié encatalan et en espagnol auxquels je n'ai rien compris. C'est alors qu'ils m'ont demandé 420 euros de plus. Soit 480 euros. Je ne pouvais pas retirer cette somme avec ma carte. Ils m'ont emmenée jusqu'à leur bureau et ils ont fait la transaction par internet."
Hélène Dupoisson reprend la route avec ses enfants. Mais quelques kilomètres plus loin, elle se précipite dans la première cabine téléphonique qu'elle trouve et contacte la gendarmerie de Bourg-Madame. Le lendemain, elle se rend en personne à la brigade pour faire une déposition et dépose plainte contre le policier catalan pour "menace avec arme sur le territoire français".
L'affaire sera-t-elle traitée devant la justice française ou espagnole ? Quoi qu'il en soit, le cas devrait faire école.