mercredi 25 juin 2008

Michel Moine : Sa ville ne fera pas tapisserie

Il est bien loin le temps où Michel Moine militait aux côtés de Manuel Valls, d’Alain Bauer ou de Stéphane Fuchs auMJS de la fac de Tolbiac.
Vingt années se sont écoulées et aujourd’hui, à 46 ans, le maire d’Aubusson entame son second mandat avec une peur non dissimulée: celle de voir peu à peu son département,la Creuse,et sa ville, Aubusson, « disparaître », «oubliés» par un État qui ne se soucie plus des territoires ruraux.
L’enfant des Yvelines a fait le chemin inverse de ses grands parents qui, en 1933, sont «montés» à Paris, comme beaucoup demaçons de la Creuse, pour mettre leur savoir-faire au service de la transformation de la capitale. Dans sa commune, souspréfecture de seulement 5 000 âmes et pourtant « capitale mondiale de la tapisserie » comme il aime l’énoncer fièrement, Michel Moine fait de la résistance. Et ce sont justement les techniques, les coutumes, et l’art de vivre de sa région que le maire veut préserver contre vents et marées. Ce malgré les vives attaques que subissent de toutes parts les structures qui permettraient de pérenniser ces valeurs ajoutées, « ce patrimoine ».
Après le tribunal d’instance, c’est aujourd’hui l’École nationale des Arts décoratifs, celle-là même qui forme aux métiers de la tapisserie, qui devra fermer ses portes car jugée trop onéreuse par l’État. Une « honte » pour Michel Moine qui peut parler pendant des heures de la tapisserie que l’illustre plasticien Garouste vient de réaliser pour la mairie d’Aubusson. Si Michel Moine s’investit aujourd’hui pleinement dans la vie de sa commune, il fut pendant presque 20 ans un des piliers du service d’ordre (SO) du PS. « Le passage de militant au SO à celui d’élu à été comme un changement de culture. Je suis passé de l’ombre à la lumière », s’amuse-t-il, remarquant que de nombreux membres du SO franchissent le pas, étant « capables de porter les couleurs du Parti avec conviction, intelligence et réussite ».
Aujourd’hui Michel Moine reste avant tout un militant qui veut éradiquer « le sentiment de souffrance et d’abandon » éprouvé dans les régions rurales. « Les habitants de ma commune ont l’impression que l’État ne s’intéresse plus du tout à eux, et ça, c’est très difficile à vivre. » Alors, sans cesse, le jeune maire se bat pour que le désenclavement ait un sens, alors qu’il faut faire plus de 80kilomètres pour arriver à la première gare qui relie la région à Paris. «À l’heure où la qualité de vie devient un élémentmajeur pour tous, ce n’est pas lemoment de laisser tomber les plus belles provinces ».Un cri dans le désert ?

Ariane Vincent